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Wednesday, February 12, 2020

Dans cette nuit profondément sombre - poème de Clementia



Dans cette nuit profondément sombre


Dans cette nuit profondément sombre
Je crie ma souffrance
Je suis trop seule
Pourquoi m’as-tu laissée ainsi
J’ai besoin d’un réconfort
Mais maintenant mon coeur est froid
Je me souviens des jours
Où nous volions tendrement
Au-dessus des arcs-en-ciel
Et maintenant je me demande pourquoi
Ce doux temps fut éphémère
C’était un amour tellement profond
Mais maintenant je reste seule
Dans des nuits d’insomnie
Les arcs-en-ciel se sont volatilisés
Et la terre est trop grise


©Clementia






In This Deep Darkest Night



In this deep darkest night
I shout my suffering
I am too lonely
Why did you leave me so
I need a reconfort
But still my heart is cold
I remember the days
We were in tenderness
Flying over rainbows
And now I’m asking why
This sweet time was fleeting
It was such a deep love
But still alone I stay
In nights of insomnia
Rainbows are now vanish’d
And the ground is too grey


©Clementia


in sweet remembrance of my dearest american artist ...
He was born a "Bastille Day" and passed away two days before Valentine's Day

Thursday, June 28, 2018

A une fois...



« A une fois… »





« A une fois… ». Les dernières paroles que j’ai entendues de ma mère avant son départ solitaire vers l’au-delà furent cet au-revoir intemporel. Cela faisait quelques années qu’elle prenait ainsi congé lorsque nous repartions de chez elle, la laissant seule dans sa grande maison…
Pourquoi avait-elle pris l’habitude de clore nos visites par cette expression, que je n’ai jamais entendu prononcer par personne d’autre ?
Il est vrai que nos visites, et encore plus celles de mes enfants et petits-enfants, n’étaient que de trop courts et trop rares moments au regard de ses longues journées trop monotones où elle ne voyait personne, et où elle n’avait quasiment personne au téléphone. Même les contacts avec ses plus proches voisins étaient rares, comme dans un peu toutes les cités pavillonnaires modernes où chacun se replie dans son petit confort égoïste une fois terminées les journées de travail à la ville…

Dans cet « à une fois », il y avait certainement l’espoir de nous revoir très bientôt pour chasser sa solitude et apporter un peu d’occupation à ses interminables journées qui se ressemblaient de plus en plus par leur fadeur. C’était la routine quotidienne du lever, suivi de la toilette, puis du petit-déjeuner pris tout en lisant le journal qu’elle recouvrait de ses annotations et commentaires crayonnés avant de remplir la grille de mots croisés. Ensuite, selon la météo, sa journée prenait un sens différent.
Si le soleil était de la partie, elle pouvait sortir dans son grand jardin dont elle cultivait avec passion tous les légumes qui constituaient sa principale nourriture (elle était tout comme moi végétarienne, depuis près d’une cinquantaine d’années, par amour des animaux), ainsi que les fleurs innombrables (il lui était arrivé d’en recenser plus d’une centaine d’espèces florales dans le jardin au cours d’une année).
Que surviennent les fortes chaleurs d’été, et elle était malheureuse de devoir passer ses journées à l’ombre et la relative fraîcheur d’une maison aux volets clos : à ces moments-là elle ne pouvait travailler le jardin qu’aux premières heures de la matinée et procéder à l’heure quotidienne d’arrosage qu’en début de soirée… Comment occuper ses journées dans la pénombre durant la canicule, alors que sa vue avait tellement baissé à cause du diabète et de la dégénérescence maculaire liée à l’âge (D.M.L.A.) ? C’était souvent à l’aide d’une loupe (en plus de ses lunettes) qu’elle lisait durant les longues heures de la nuit où le sommeil ne venait pas. C’était aussi aux heures de la nuit qu’elle rédigeait parfois ses impressions et souvenirs, sur des cahiers que je relis à présent pour renouer avec elle comme un dialogue avec l’au-delà où se repose désormais son âme…
Si les étés trop chauds pour travailler au jardin lui apportaient quand même les joies de la floraison de tant de belles fleurs et la belle croissance des légumes qu’elle surveillait avec la passion de l’amateur éclairé, c’est surtout la venue des jours froids avec l’arrivée de l’automne qui teintait son moral de grisaille, avant la longue période qu’elle nommait sa « déprime d’hiver » qui s’étirait jusqu’au retour des beaux jours de printemps.

L’impression de se sentir inutile, oubliée de tous dans un monde où elle ne servait plus à rien et où elle n’avait plus sa place, combien de fois nous en a-t-elle parlé !
Il faut reconnaître que, principalement pour les plus jeunes générations, c’était parfois pénible de l’entendre exprimer tant de négatif sur son moral, sur sa vue qui déclinait et son diabète, sur son manque d’occupations intéressantes, sur les longues journées sans personne à qui parler…Il était souvent difficile de trouver les mots pour lui remonter le moral, lui apporter des sujets positifs sur lesquels fixer son attention. Elle se faisait aussi beaucoup de soucis pour sa descendance, sur le monde d’aujourd’hui où les petits-enfants et arrière-petits-enfants auront à affronter tant de difficultés (la crise, le chômage, les conflits, les catastrophes écologiques, l’éducation qui « n’est plus ce qu’elle était », etc.).
Et donc, elle avait de moins en moins de visites pour la distraire d’un quotidien très monotone et qui ne lui apportait pas grande motivation…

« A une fois », cela voulait-il dire « à une autre fois », « à la prochaine fois » ?
Ou même plutôt, était-ce un « à bientôt, j’espère » que sa pudeur ou sa fierté l’empêchaient de formuler, lorsque nous n’avions pas convenu d’un rendez-vous précis pour des courses ou une visite au médecin ?
Ou bien, cela voulait-il dire « adieu, si nous ne nous revoyons plus, au cas où je pourrais enfin m’endormir de mon dernier sommeil… » ? En effet, cela faisait plus d’une dizaine d’années (si j’y réfléchis, depuis le décès de mon père, puis sa propre santé déclinant quand même au fil des ans) qu’elle nous rappelait de plus en plus souvent qu’elle ne se sentait plus aucune raison de vivre, hormis son jardin… Elle espérait s’endormir simplement un soir et « partir » pendant son sommeil. Elle ne voulait surtout pas décliner lentement entre maison de retraite et hôpitaux, loin de ses habitudes et de son jardin, et elle nous avait bien précisé que nous devrions nous opposer à ce que sa vie soit prolongée médicalement s’il lui arrivait quelque chose.

Ce jeudi-là, vingt-sept juin, elle était heureuse d’avoir pu faire avec moi ses courses en Allemagne, à une trentaine de kilomètres de son domicile, au supermarché de discount où elle aimait retrouver certaines de ses denrées préférées (notamment les Kaffeesahne – petites canettes de crème pour le café dont elle faisait à chaque fois la provision pour les deux à trois mois qui espaçaient nos expéditions en Allemagne).
Sur la route, alors que je conduisais, elle me parlait de sa vue qui était en bonne voie d’amélioration après l’injection de lutéine qui lui avait été faite trois semaines auparavant : depuis trois jours elle pouvait à nouveau lire tous les petits caractères d’imprimerie de son journal sans loupe ni lunettes, et appréciait ce progrès survenant après plusieurs semaines de grosse déprime.
Elle racontait aussi, comme souvent, beaucoup de ses souvenirs de jeunesse et de sa vie qui avait été bien remplie et occupée par du bénévolat au sein de nombreuses associations avant les années de solitude.
A l’aller, malgré un petit crachin intermittent, on voyait en ligne d’horizon la Forêt Noire où elle avait guidé maintes excursions en montagne pour des associations de marcheurs et de personnes âgées. Au retour, le temps était redevenu radieux, et tout le massif vosgien qu’elle avait tant parcouru depuis son enfance nous offrait un magnifique panorama. Rétrospectivement, je me dis que ses belles montagnes la saluaient ainsi de leur beauté au cours de ses dernières heures ici-bas…
L’ayant aidée à monter ses achats chez elle, je l’ai ensuite quittée car, l’après-midi n’étant pas trop avancé, elle envisageait une petite sieste avant ses émissions télévisées de début de soirée. Nous avions convenu que je la conduirais la semaine suivante à la poste et à l’hypermarché, mais sans en préciser le jour vu qu’elle venait de faire ses provisions.
C’est ainsi que, rejoignant ma voiture, j’entendis son ultime «A une fois... ».

Le lendemain, c’est sa voisine qui la trouva, dans la salle de bains où elle avait été terrassée par une crise cardiaque, trois semaines après son quatre-vingt-sixième anniversaire…







Saturday, December 06, 2014

Saint Nicolas à Guebwiller (quelques extraits des souvenirs d'enfance de Clementia, à paraître)

Saint Nicolas à Guebwiller

Le cinq décembre au soir, veille de la Saint-Nicolas, est pour les enfants d’Alsace un moment particulier, attendu avec une impatience souvent mêlée de crainte, selon qu’ils aient été bien gentils ou désobéissants pendant l’année écoulée.
D’r Santi Kloïs[1] est le patron des écoliers, et à ce titre il vient leur rendre visite le soir qui précède sa fête sur le calendrier.

De nos jours, Santi Kloïs commence sa tournée par les écoles maternelles et primaires. Pour préparer sa venue, les enfants ont appris une chanson ou une récitation dont il est le héros et qu’ils chanteront ou diront en son honneur au moment de son passage. Souvent, les élèves préparent aussi chacun un bricolage, par exemple une petite corbeille à son effigie dans laquelle ils trouveront quelques sucreries, ou bien un petit Saint Nicolas de papier ou de feutrine qui pourra être accroché au sapin de Noël…
Lorsqu’il visite les écoles, le Saint Nicolas arrive généralement en calèche, ou plus rarement sur son âne. Enveloppé dans sa houppelande et coiffé de sa mitre, il tient à la main sa grande canne surmontée d’une crosse : n’oublions pas que de son vivant, ce saint était évêque de Myre… Alors qu’on devine un sourire sous sa barbe blanche, il écoute avec bienveillance les enfants qui récitent ou chantent un petit compliment, puis il félicite les bons élèves et distribue à tous chocolats, pains d’épices et clémentines. A part le conducteur de la calèche, personne ne vient généralement avec lui dans les écoles.
Mais le soir venu, pour sa visite dans les familles, il est accompagné d’un personnage beaucoup plus inquiétant : le Père Fouettard, qui en Alsace se nomme Hans Trapp

Dans mon enfance, Saint Nicolas n’avait pas encore l’habitude de venir rencontrer les élèves comme il le fait maintenant dans les écoles d’Alsace : nous trouvions simplement les pains d’épices, chocolats et clémentines sur nos pupitres au retour de la récréation, car ils avaient été distribués pendant les quelques minutes où nous jouions dans la cour. Récitations ou chansons étaient exécutées en chœur par toute la classe en son honneur : nous étions certains qu’il nous voyait et nous entendait de là où il était déjà reparti…
A la fin de la journée d’école, nous rentrions à la maison comme d’habitude, mais ce jour-là il était de tradition dans les familles alsaciennes d’attendre le passage du Santi Kloïs autour d’un goûter de fête : nous mangions des Mannala en dégustant un bon chocolat chaud. Pour cette occasion, ma tanteRig savait même le préparer « à l’ancienne » : si je me souviens bien de ses explications, elle faisait fondre toute une tablette de chocolat noir dans un pichet de lait bouillant additionné de sucre et d’un peu de cannelle, puis elle mélangeait cela énergiquement à la main avec le fouet métallique. Le chocolat chaud devenait alors bien mousseux. Ça sentait bon dans toute la maison et c’était un vrai régal.
Tout en dégustant cette collation, chacun tendait l’oreille pour essayer d’entendre à l’extérieur le tintement de la clochette qui annonçait l’arrivée du saint homme…
Subitement, la porte s’ouvrait avec brusquerie et surgissait avec fracas un personnage sombre que les enfants n’osaient pas trop regarder : muni d’un grand fouet de branchages, c’était Hans Trapp, le Père Fouettard dont tant de parents prédisaient la venue tout au long de l’année à ceux qui désobéissaient ! Hans Trapp était à la recherche des méchants enfants pour les emporter dans son grand sac qui semblait agité de soubresauts…
Enfin, quand les enfants les moins sages, qui n’avaient pas du tout la conscience tranquille, étaient à la limite de trembler de peur, la porte s’ouvrait à nouveau : c’était le Grand Saint Nicolas qui arrivait pour les sauver ! Le saint homme calmait son acolyte, tout en faisant promettre aux enfants désobéissants qu’ils seraient dorénavant sages comme des images, sinon l’an prochain il ne pourrait peut-être pas empêcher Hans Trapp d’enlever les petits sacripants à la douceur du nid familial.


Ensuite venait la distribution de douceurs, chocolats, pains d’épices et sucreries pour les bons élèves et les enfants sages. Mais les cancres et les vilains ne recevaient qu’un petit fouet décoré de quelques étoiles chocolatées en sucre et quelques morceaux de Baradrack - il paraît même que parfois ceux qui avaient été vraiment très méchants recevaient seulement de véritables morceaux de charbon, ainsi qu’un vrai fouet ou même un martinet aux menaçantes lanières de cuir… D’r Santi Kloïs donnait aussi des noix et des clémentines pour toute la famille.
Chaque enfant remerciait en interprétant un poème, une comptine ou une chanson. Souvent, la maman servait aussi au Santi Kloïs un café avec un petit verre de schnaps (ou un verre de vin chaud) et on n’oubliait pas de lui donner aussi une carotte et quelques morceaux de sucre pour son âne qui attendait dehors.
Après cela, Santi Kloïs et Hans Trapp continuaient leur tournée dans le soir tombant, après que les enfants aient promis une nouvelle fois d’être bien sages dorénavant.

Ce n’est pas pour me vanter, mais il faut reconnaître que je ne me souviens pas d’avoir reçu la visite du Père Fouettard. En effet, j’avais de bons résultats scolaires et Saint Nicolas, qui venait chez nous seul, me faisait juste promettre de faire des efforts pour être moins insolente, moins bavarde, et d’arriver désormais à l’heure à l’école…


[1] D’r Santi Kloïs : (alsacien)  le Saint-Nicolas


Friday, December 07, 2007