Friday, August 12, 2005

Le forçat innocent - poème de Jules Supervielle

 

(image : Pixabay)

Le forçat innocent

Livrez vos mains aux miennes,
Ecoutez la rumeur :
Nos âmes attardées
Viennent de leurs frontières.

Voici qu'elles se touchent.
C'est l'ombre et la lumière
Qui se croient immobiles
Et tremblent de changer

*

dans votre grand silence
vous avez l'air de dire
un chant irréparable
qui part de la montagne
et gagne au loin la mer.

Une à une les choses
Vont douter de leurs gonds.
Un coeur de l'an dernier ?
Un coeur de l'an prochain
Habite nos poitrines
Déjà tout se souvient :
Ce nuage, le mont, le paquebot, sa route
Et ce grand ciel partout
Qui nous lia les mains.


Jules Supervielle          


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